Publié et traduit par Winter – Dávila & Associés.
Paris, 01 avril 2021.

Auteur: Blas Pugliese

Avocat diplômé de l’Université de Buenos Aires (Argentine). Il est membre du Barreau de Buenos Aires et du Barreau de la province de Buenos Aires. Il est titulaire d’un diplôme de troisième cycle en « Gestion du sport, marketing et société » de l’université de Milan-Bicocca (Italie) et d’un diplôme de troisième cycle en « Diritto Sportivo e Guistizia Sportiva » de l’université « Degli Studi di Milano » (Italie). Il est également associé fondateur du cabinet d’avocats Ludus Law, basé à Buenos Aires.

D’autre part, Blas est le directeur de l’Institut de droit du sport de la province de Buenos Aires et de la Revue de droit du sport de la maison d’édition juridique latino-américaine Microjuris.com

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De nos jours, force est de constater que l’émergence des débats autour de la question du genre a un fort retentissement dans le débat public, non seulement dans le cadre d’une lutte pour l’égalité, mais aussi dans l’approche des questions subsidiaires qui en découlent.

Le sport n’est ainsi pas exclu de ces débats, où l’on rencontre de nombreuses situations qui méritent que ces questions autour du genre soient approfondies, et prises en compte par tous les acteurs du sport. Si la question n’est pas nouvelle dans le monde du sport – des précédents existent depuis au moins cinquante ans – le prisme actuel autour de ces questions l’est. En effet, la multiplicité des cas dans le monde, et ce dans des disciplines différentes est un fait relativement nouveau.

Laurel Hubbard est une athlète transgenre néo-zélandaise qui pratique l’haltérophilie. Elle a remporté une médaille d’argent aux Championnats du monde d’haltérophilie 2017, dans la catégorie des +90 kg (photo : mundodeportivo.com)

La complexité de la question réside dans les nombreuses ramifications qui surgissent petit à petit au moment d’aborder le thème du genre dans la pratique du sport. La traditionnelle classification binaire établie par les fédérations sportives, entre catégorie masculine et catégorie féminine, est aujourd’hui bousculée non seulement par les interrogations autour de la « binarité », mais aussi par la volonté de plusieurs « groupes » d’être reconnues, telles que le collectif LGBTQ (lesbiennes, gay, bisexuels, transgenres et queer), les personnes « intersexuelles » ou « asexuelles » (les parenthèses étant ajoutées car des débats existent également sur la sémantique à utiliser).

Cela s’inscrit dans un mouvement initié depuis quelques années, le Fédération Anglaise et le « Home Office » (un département exécutif du gouvernement britannique chargé, entre autres, des questions migratoires) ayant durci les conditions d’obtention du permis de travail pour les joueurs étrangers, dans l’optique de favoriser l’éclosion des jeunes joueurs anglais.

Il ne fait plus guère de doute, à notre époque, que la pratique du sport est reconnue comme un droit fondamental et universel. Par ailleurs, une série de droits et de garanties reconnaissant les minorités ou les groupes vulnérables permet de les protéger contre toute forme de discrimination.

Par conséquent, si :

a) La pratique du sport est un droit fondamental et universel reconnu par de nombreux textes normatifs (à l’instar de la Charte Olympique) pour tous les êtres humains ;

b) Les fédérations sportives organisent la pratique du sport en fonction du genre (binaire, avec certes d’autres indicateurs, tels que l’âge, la nationalité, le poids) ;

c) Dès lors, il convient de s’interroger sur le fait de savoir comment s’intègrent à cette pratique du sport les personnes transgenres ou « intersexuées »

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Les fédérations sportives ont déjà tenté de légiférer sur le sujet, mais se sont pour la plupart toutes heurtées aux législations et à certaines décisions de justice. Depuis le Consensus de Stockholm en 2003 jusqu’au Consensus de Lausanne en 2015, en passant par les différentes réglementations des Fédérations Internationales comme la FIFA, la ITF, la FIH ou encore la FIBA, cette production normative ne parait cependant pas en adéquation avec la tendance mondiale, ou du moins dans de nombreux pays, qui tend à relativiser la pertinence du critère du genre dans la pratique du sport. En ce sens, certains États vont même jusqu’à autoriser l’établissement de carte d’identité sans les informations relatives au sexe.

Callum (Hanna) Mouncey est une joueuse de handball transgenre de nationalité australienne qui joue également au football australien. Hanna a représenté l’Australie dans le handball masculin avant de se convertir (photo : regionenlibertad.com)

Sans volonté d’être exhaustif, il convient de distinguer quatre scénarios potentiels de conflit manifeste dans les cas de compétitions où participeraient des personnes transgenres, ou sans genre défini. Le premier scénario de conflit serait de nature purement sportive, le deuxième de nature civile, le troisième de nature économique, et le dernier de nature fédérative.

Quant au premier, il s’agit de situations purement sportives, lorsqu’une médaille est attribuée et obtenue par une personne transgenre (cf. en ce sens, la néo-zélandaise Laurel Hubbard ou la canadienne Rachel Mckinnon).

En ce qui concerne le second, il s’agit là des cas de responsabilité civile, lorsqu’un dommage corporel est causé par un usage démesuré de la force dans le cadre de l’activité sportive en question (cf. en ce sens, l’australienne Hannah Mouncey ou l’américaine Fallon Fox).

Quant au troisième scénario, il s’agit des situations concernant les sports professionnels pour lesquels les prix ou les gains économiques obtenus sont différents en fonction du « genre » (cf. par exemple, le cas de l’américaine Renee Richards ou de la brésilienne Tiffany Abreu).

 Enfin, le quatrième scénario de conflit concerne les personnes « sans genre défini » (non binaire) qui souhaitent participer à une compétition qui ne prendrait en compte que les catégories « masculine » et « féminine ».

Fallon Fox, lutteuse transgenre a brisé le crâne de deux femmes. (photo : actuall.com)

Dans l’intérêt d’une pratique intègre du sport, de la spécificité du sport et du principe d’autonomie des Fédérations internationales, est-il légitime de maintenir une limitation ou une exception à la pleine reconnaissance des droits des personnes ne s’identifiant pas à la classification binaire du genre ?

De manière générale, il existe des positions opposées sur l’autorisation due aux athlètes transgenres ou non binaire pour la pratique sans restriction du sport fédéré, étant donné que d’une part il existe une réticence insistante (principalement de la part des fédérations ou organisations sportives) au libre exercice du droit de pratiquer un sport dans les conditions ci-dessus au nom de l’intégrité du sport, et d’autre part, principalement des acteurs sans lien direct avec les fédérations ou organisations sportives (par exemple, les mouvements de genre, les courants philosophiques, la justice ordinaire, la législation générale) qui promeuvent la participation sportive de manière fédérée indépendamment du genre, en donnant la prévalence au bien supérieur de l’égalité et de la non-discrimination.

De manière plus particulière, j’aurais tendance à soutenir que nous faisons face à une situation extrêmement complexe dans laquelle de nombreux conflits sont à prévoir. Il sera par conséquent sûrement nécessaire de mobiliser divers champs de compétences pour mieux appréhender la question : le droit, la sociologie, la psychologie, la philosophie etc., compte tenu du fait que le sport est l’une des activités les plus pratiquées par l’être humain, à tout âge, dans toutes les régions du monde, à un niveau professionnel, de loisirs, par des personnes de religions diverses, de couleurs de peau diverses, par des femmes, des hommes mais aussi des personnes transgenres, « asexuées » ou « non-binaires », et cette multiplicité de situations nécessite une réflexion en vue de parvenir à un consensus sur les modalités de pratique sportive de tous.

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Langue originale de l’article : Espagnol

AVIS LÉGAL : Cet article a été préparé à des fins d’information uniquement. Il ne remplace pas un conseil juridique adapté à des circonstances particulières. Vous ne devez pas engager ou vous abstenir d’engager une action en justice sur la base des informations contenues dans le présent document sans avoir au préalable sollicité un avis professionnel et individualisé en fonction de votre propre situation. Le recrutement d’un avocat est une décision importante qui ne doit pas être basée uniquement sur les publicités.

Cet article a été publié et traduit par Winter – Dávila & Associés, un cabinet international basé à Paris – France, composé d’avocats spécialisés dans le droit du sport, le droit des sociétés, l’arbitrage et la représentation.

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