Auteur: David Winter 🇫🇷
Avocat 

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Publié par Winter – Dávila & Associés.
Paris, 6 octobre 2025.

Le football féminin connaît une ascension fulgurante. Longtemps considéré comme marginal dans l’industrie du sport, il s’impose désormais comme un marché de premier plan. Mais cette croissance, si elle ouvre des perspectives inédites, s’accompagne aussi de défis juridiques et contractuels que joueuses, entraîneur·es et clubs doivent anticiper.

Une croissance spectaculaire, mais encore fragile

Selon le dernier rapport de Deloitte (mars 2025), les revenus mondiaux du sport féminin d’élite devraient dépasser 2,35 milliards de dollars cette année, contre 1,88 milliard en 2024. En quatre ans, la progression est estimée à près de 240 %, portée en grande partie par le football et le basket. En Angleterre, la Women’s Super League illustre cette dynamique : ses clubs ont généré 65 millions de livres en 2023/24, soit une hausse de 34 % en un an, avec pour la première fois des revenus supérieurs au million pour chaque club. L’après-Euro 2025 devrait propulser ces chiffres vers la barre des 100 millions en deux saisons.

Pour autant, l’équilibre reste précaire. Un récent rapport de la FIFA souligne que le salaire brut moyen d’une footballeuse professionnelle à l’échelle mondiale s’élève à environ 10 900 dollars annuels, avec des disparités considérables selon les pays et les ligues. Derrière les stades remplis et l’engouement médiatique, le modèle économique demeure inégal et expose certaines joueuses à une insécurité professionnelle encore marquée.

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Les nouvelles protections imposées par la FIFA

Depuis le 1er juin 2024, la FIFA a renforcé son règlement sur le statut et les transferts (RSTP), en étendant aux joueuses, mais aussi désormais aux entraîneur·es, une série de droits liés à la parentalité et à la santé. Congé maternité de 14 semaines rémunérées, congé adoption de huit semaines, reconnaissance des droits des mères non biologiques, ou encore prise en compte des troubles menstruels sévères : ces mesures, inédites dans l’histoire du football, traduisent une volonté de rapprocher le cadre du sport féminin de standards sociaux essentiels.

Ces évolutions imposent une mise à jour des contrats de travail. Clubs et fédérations doivent intégrer des clauses précises sur le déclenchement de ces congés, le maintien de la rémunération, l’organisation du retour au jeu ou encore la possibilité d’inscrire une remplaçante hors périodes de mercato. À défaut, le risque de contentieux, devant les juridictions sociales comme devant les instances sportives, est réel.

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Transferts et formation : l’impact du FIFA Clearing House

Autre nouveauté : la mise en œuvre du FIFA Clearing House, qui centralise et sécurise le paiement des indemnités de formation et de solidarité. Jusqu’ici concentré sur le football masculin, l’outil est désormais opérationnel aussi pour les transferts féminins : plus de 270 000 dollars ont déjà été distribués dans ce cadre en 2024. Pour les clubs formateurs, la documentation précise du parcours des joueuses devient stratégique. Pour les agents, c’est un levier à intégrer dans la négociation de primes et de clauses de revente.

Données de performance et RGPD : vigilance accrue

L’essor du football féminin s’accompagne d’une collecte croissante de données biométriques et de performance. En France, la CNIL a rappelé que ces informations, parfois relatives à la santé, sont soumises au régime renforcé du RGPD. Clubs et prestataires doivent donc mettre en place des contrats de traitement conformes, limiter l’accès aux données médicales au seul staff concerné et prévoir leur portabilité en cas de transfert. L’UEFA, de son côté, a diffusé une Concussion Charter (charte commotion) qui impose aux clubs et sélections la sortie immédiate des joueuses en cas de suspicion de commotion cérébrale.

Quels enseignements pour les joueuses, coachs et clubs ?

Pour les joueuses, l’enjeu est de sécuriser leur carrière par des contrats mieux rédigés, intégrant les nouveaux droits sociaux et clarifiant l’usage de leurs données personnelles. Pour les entraîneur·es, il s’agit de profiter des réformes du RSTP, qui leur garantissent des protections inédites. Pour les clubs enfin, la professionnalisation ne doit pas s’arrêter au terrain : investir dans la conformité juridique et contractuelle est désormais un passage obligé pour transformer l’engouement actuel en modèle durable.

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Conclusion

La trajectoire du football féminin est claire : sa valeur sportive, économique et médiatique est en pleine expansion. Mais sans un cadre contractuel robuste, conforme aux nouvelles normes FIFA et aux exigences européennes en matière de données et de santé, cette croissance pourrait se heurter à des obstacles juridiques majeurs. Plus que jamais, le droit devient un levier de développement durable, garantissant aux joueuses, aux entraîneur·es et aux clubs que l’essor actuel ne soit pas une bulle, mais une fondation solide pour l’avenir.

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